UNE PIÈCE DE THÉÂTRE VUE COMME UN VIVARIUM PHILOSOPHIQUE !
© Julie Artacho
Source
Maryann Vézina
Agora des Arts
Le jeudi 4 avril à 19h, l’Agora des Arts présentera le spectacle Malaise dans la civilisation, une création d’Étienne Lepage et Alix Dufresne. Si certaines répliques ou actions semblent improvisées, il s’agit au contraire de petites prouesses théâtrales et d’un travail corporel chirurgical. Cette création secoue les normes tant sociales que théâtrales, joue avec la frontière entre la scène et la salle et déjoue brillamment les attentes des spectateur·rice·s.
PRÉSENTATION
Dans ce spectacle aussi inattendu qu’amusant, un quatuor débarque sur scène, comme des touristes, en toute ignorance des règles théâtrales. Avec un naturel désarmant, ces créatures explorent maladroitement l’espace, vaquent à leurs occupations et provoquent des accidents. Au rythme de leurs pulsions et réflexions, ils et elles tissent des relations, se défient et déstabilisent les spectateur·rice·s. Évoluant au sein de ce vivarium théâtral, ces êtres captivants et vulnérables se laissent regarder sans gêne et s’aventurent à la limite des conventions sociales, en toute inconscience.
Dans ce théâtre déconstruit qui ne dépend pas d’un texte dramatique habituel, rien ne semble se passer. Or, chaque action est orchestrée au quart de tour. Cet échantillon d’humanité brute transforme graduellement l’espace vide de la scène en un univers absurde et grotesque, débordant de possibles. Les défauts et lubies de ces quatre personnages projettent le public dans des éclats de rire, des éclairs de lucidité et des moments de malaise. Remplie de surprises, cette pièce non conventionnelle démontre, sous le couvert de l’insouciance, une théâtralité des plus maîtrisées.
MOT DE LA CRÉATRICE ALIX DUFRESNE
La création puise son inspiration dans Les idiots de Lars Von Trier. Un film marquant que la metteuse en scène, Alix Dufresne, a fait découvrir à l’auteur. « On a trouvé l’essence de ce qui nous intéressait dans Les idiots : « le commentaire politique de se refuser aux normes sociales et le côté sensoriel d’être un idiot », explique Alix Dufresne. « On met ensemble ces personnages qui ne sont pas des enfants, ni des adolescents, des clowns ou des idiots, mais peut-être un peu tout ça en même temps, dans un vivarium, où le public les observe. Ils sont comme des singes dans une cage. Ils savent qu’on est là, ils peuvent interagir avec nous. Mais, incroyable, ils nous oublient parfois. » Les personnages de Malaise dans la civilisation, eux, se révèlent à la fois interdépendants et insensibles aux autres : « Ils manquent d’écoute et ont une complète absence d’empathie envers autrui. Et moi je pense que c’est ça, notre rapport au monde et aux choses. » Un comportement qui n’est pas sans séquelles. « Ne sont-ils juste pas conscients des conséquences, ou est-ce qu’ils s’en foutent ? reprend Alix Du-fresne. Il y a un doute qui plane. Autant ils peuvent être vulnérables, autant ils peuvent dé-molir un lieu et s’en aller comme si de rien n’était. Se démolir les uns les autres, et eux-mêmes. Et ils nous laissent avec la question des conséquences. Avec ce malaise-là. Et leur négligence face à ce qui les entoure « devient une métaphore de notre maladresse à habiter le monde. »
CRÉDITS
Production | Étienne Lepage
Mise en scène | Alix Dufresne et Étienne Lepage
Texte | Étienne Lepage
Interprétation et cocréation | Debbie Lynch-White, Maxime Genois, Renaud Lacelle-Bourdon et Alice Moreault
Scénographie et costumes | Odile Gamache
Lumières | Leticia Hamaoui
Musique | Robert Marcel Lepage
Direction Technique et régie | Seoyoung Park
Assistance direction technique : Anne Parent
Production déléguée | DLD | Direction artistique Frédérick Gravel